OPINIONS : Souveraineté intellectuelle et transformation de l’État, le défi de l’innovation endogène


 

 

La refondation nationale nous oblige à interroger la manière dont se construit notre opinion publique et à mesurer l’impact de la pensée occidentale sur notre quotidien. Nos institutions se sont appauvries en innovations endogènes, en reproduisant des schémas hérités des puissances impérialistes.

L’inefficacité de notre administration publique trouve en partie son origine dans le manque de volonté de rompre avec des modèles exogènes, au profit des valeurs morales, culturelles et organisationnelles qui nous sont propres et qui pourraient fonder une véritable réorganisation des pouvoirs publics.

La réhabilitation des modèles endogènes de gouvernance notamment ceux issus de la chefferie traditionnelle constitue une étape importante, car ces structures ont montré à suffisance leur capacité à assurer la cohésion communautaire, la résolution locale des conflits et, potentiellement, la lutte contre l’insécurité. Il est temps que nos intellectuels se libèrent du mimétisme occidental dans leurs réflexes professionnels et académiques.

Nos États africains sont encore prisonniers d’une redondance d’idées portée par un « intellectualisme perroquet ». Cette colonisation intellectuelle des élites rend les populations vulnérables à un néocolonialisme idéologique, influençant les normes, les modèles de développement et les choix politiques.

Ainsi, une partie de nos cadres et universitaires est toujours critique à l’égard des références locales, car leur formation académique ou professionnelle les a ancrés dans des paradigmes occidentaux présentés comme universels. Ils ne conçoivent le progrès qu’à travers le prisme du modèle occidental, devenant les gardiens d’un système de pensée qui s’inscrit souvent en contradiction avec nos réalités culturelles et nos intérêts collectifs.

Il est urgent de réhabiliter nos institutions dans une dynamique endogène, créative et adaptée à nos sociétés. Nos autorités doivent promouvoir l’innovation fondée sur notre référentiel culturel afin de nourrir une opinion publique autonome et de renforcer la légitimité de nos institutions. Il est temps de sortir du cocon intellectuel imposé et de libérer la pensée africaine pour écrire nous-mêmes les cadres de notre développement.

Abdoulaye Idrissa James