JUSTICE : La chute du Procureur Général, un signal fort pour l’État de droit au Niger (Affaire Oubandawaki)
Niamey – Mercredi 24 Septembre 2025 : L’annonce du limogeage du Procureur Général près la Cour d’État dans l’affaire dite Oubandawaki ne saurait être réduite à un simple changement administratif. Elle révèle au contraire une dynamique profonde et préoccupante autour de la justice et de l’État de droit au Niger. Cette décision met en lumière les tensions entre l’autorité judiciaire et l’exécutif, et nous invite à réfléchir sur la véritable place de la loi face aux individus, quelle que soit leur position hiérarchique.
Le Procureur Général, bien que garant de l’application de la loi et de la protection des institutions, n’est pas au-dessus de celle-ci. Son rôle n’est pas celui d’un monarque souverain décidant arbitrairement du sort des affaires judiciaires, mais celui d’un magistrat dont la mission est de veiller au respect du droit et de l’équilibre des pouvoirs. Or, dans le cadre de l’affaire Oubandawaki, ses décisions et son attitude ont été jugées comme un acte d’insubordination et d’obstruction à la justice.
Ce limogeage pose une question essentielle : comment concilier l’indépendance de la magistrature avec la responsabilité de chaque magistrat devant la loi et la hiérarchie légale de l’État ? Dans notre architecture judiciaire, le juge siège en toute indépendance, mais toujours dans le cadre du droit et de la légalité. L’organe du Parquet, loin d’être une entité autonome au-dessus des lois, doit s’inscrire dans un équilibre garantissant à la fois la sécurité juridique et la crédibilité de l’État.
La chute du Procureur Général ouvre donc une voie importante pour la justice : celle de rappeler à tous, magistrats comme citoyens, que nul ne peut se prévaloir d’une position pour échapper aux règles et aux obligations qu’impose la loi. Elle est aussi un avertissement contre l’extension incontrôlée du pouvoir individuel dans les sphères judiciaires, susceptible de fragiliser les institutions et de créer un dangereux précédent.
Au-delà de cette affaire, c’est l’ensemble du système judiciaire nigérien qui est interpellé. La société attend de la magistrature impartialité, rigueur et courage dans la défense de l’intérêt général. Les manœuvres dilatoires et les stratégies d’influence doivent être combattues pour préserver l’autorité de la loi et restaurer la confiance des citoyens dans l’État.
Le limogeage d’un haut magistrat n’est jamais un événement anodin. Il doit être analysé comme un moment décisif dans la construction d’un État où la justice n’est pas un privilège mais un droit, et où la loi reste le seul guide, même pour ceux qui la servent.
Idrissa Soumaila / Juriste